POESIE CONTEMPORAINE -Christophe Tarkos - 1963-2004
Editions POL,1998
Christophe Tarkos est une figure très importante dans la poésie contemporaine française. Mort prématurément à l'âge de 40 ans des suites d'une longue maladie , il a contribué à renouveler fortement la poésie dite "moderne". Il se présente ainsi sur le site des éditions POL:
"Je suis né en 1963. Je n'existe pas. Je fabrique des poèmes.
1 je suis lent, d'une grande lenteur
2 invalide, en invalidité
3 séjours réguliers en hôpitaux psychiatriques depuis 10 ans"
Tout un programme ! Mort prématurément, il est déja un mythe dans ce milieu très fermé qu'est la poésie contemporaine. On le compare à Bernard-Marie Koltès au Théâtre. Reconnu par Christian Prigent comme un poète capital
Je vous conseille vivement d'aller lire l'article qui lui est consacré dans "Le littéraire" à l'adresse suivante :http://www.lelitteraire.com/article1184.html
Refusant tout lyrisme, sa poésie est à la fois visuelle et sonore. Nulle strophe, pas de vers, mais une prose à effet visuel sans ponctuation.
Par exemple, dans Caisses , Tarkos nous livre des poèmes en prose sous forme visuelle de carrés, d'où le titre. Aucun paragraphe, très peu de points. Tarkos déverse violemment ses phrases, joue des réitérations et des ruminations verbales. Sur une dizaine de lignes, il déclame souvent quelque chose d'insignifiant (description d'une théière, du lait,du ciel, souvenirs....) qu'il va décliner de plusieurs manières même si ces modifications sont souvent infimes. Il explore alors tous les possibles jusqu'à l'écoeurement et l'essoufflement pour exprimer quelque chose de banal.
Tarkos était l'un des grands spécialistes de la lecture-performance. Il est vrai que lorsque l'on lit ces "caisses" , on se dit qu'il faut un sacré talent pour réciter cela !
Inutile de disserter plus longtemps ; je vous laisse découvrir quelques extraits :
Je fume :
"Je fume, la fumée s'échappe, la fumée sort, la fumée me sort
de la tête , ma tête laisse échapper de la fumée, je laisse
échapper de la fumée au dessus de ma tête, ma chaleur
part en fumée, une fumée monte du dessus de ma tête dans
le ciel, je fume, je fume en l'air, ma tête est trouée, de la
fumée monte dans le ciel me sort de la tête,je ne peux pas
la retenir, je la laisse, je la laisse s'échapper, qu'elle
s'échappe, monte dans le ciel, je me laisse faire, c'est toutes
mes forces, c'est ma chaleur, c'est ma vitalité, elle part dans
le ciel, je n'arrête pas de fumer, je fume comme une chemi-
née, la fumée s'élève dans le ciel, adieu ma fumée, fais un
beau voyage , je fume, la fumée me sort de la tête, va vers le
ciel, elle ne s'arrête jamais, il y a un trou dans ma tête, la
fumée me sort de la tête et s'envole dans le ciel perdue à
jamais, ma chaleur s'échappe, que la fumée parte et s'élève
dans le ciel, que je m'échappe, que la chaleur sorte par le
dessus de ma tête, qu'elle parte en fumée, je pars en l'air, je
fume dans le ciel, ma chaleur part, je te laisse partir, je me
vois partir en fumée dans le ciel, au revoir moi.
Voila. En resserant les mots , je vous assure que cela ressemble à un carré parfait !