Julliard, 1952
Salué comme une révélation en 1952, Le Requiem des innocents est le premier roman de cette auteur d’origine italienne , né à Turin en 1928 et mort en France en 1994. Son œuvre encore largement méconnue par le grand public est considérée comme l’une des plus importantes du 20e siècle. Sur cette œuvre, souffle un parfum de scandale. Dans La mécanique des femmes, il met en scène plusieurs figures féminines qui évoquent sans pudeur leur sexualité. Son autobiographie Septentrion censurée pendant plusieurs années pour avoir mis en avant la sexualité et la violence est considérée comme un chef d’œuvre. e vous propose de découvrir Requiem des innocents, le récit autobiographique de son enfance d’immigré italien dans la « zone » de Lyon, lieu du nom droit et de la violence. Y règne sans partage la violence, la sexualité, l’alcoolisme et la saleté. Tout commence par une insulte à la bonne conscience bourgeoise : Calaferte, le seul élève à obtenir son certif, le déchire avec fierté devant le directeur de l’école !!! Oubliez les récits de l’enfance fondés sur les beaux souvenirs nostalgiques ! Ce livre est plutôt l’héritier de Vallès avec la misère en plus. L’enfant n’est pas un être innocent mais au contraire une créature vile qui n’hésite pas à violer les petites filles et maltraiter les handicapés….Ce livre a dû faire un drôle de scandale dans les années 50…. Calaferte n’hésite pas à traiter sa mère rétrospectivement. Deux sentiments dominent le livre : la révolte d’appartenir à un milieu déchu, réduit à l’animalité mais aussi la fierté à apprendre la vérité de l’homme au cœur de la misère. La langue violente et argotique respire l’authenticité et la révolte. Ce livre peut faire penser à un titre plus actuel, Le gône du Chaaba de Azouz Begag , récit d’une enfance dans un bidonville de Lyon. Mais Calaferte refuse tout système scolaire alors que le petit Azouz s’intégrait grâce à l’école. Un livre primordial, la voix du peuple déchu érigée en chef d’œuvre…. Voici quelques extraits : « Pour toucher, pour voler un peu de vérité humaine, il faut approcher la rue. L’homme se fait par l’homme. Il faut plonger avec les hommes de la peine, dans la peine, dans la boue fétide de leur condition pour émerger ensuite bien vivant ;, bien lourd de détresse, de dégoût, de misère et de joie. Avec les hommes de la peine, il faut vivre dans le coude à coude. Mélanger aux leurs sa sueur…Toucher leurs plaies des cinq doigts, boire à leurs verres, pleurer leurs larmes, faire gémir leurs femmes , partager leurs pauvres espoirs et leurs petits bonheurs » « Vous pouvez m’appeler, je n’aime bien que la misère des hommes. C’est un bout de notre vérité, la misère. Ca vous fait tenir les yeux écarquillés. Ca vous détruit. Ca vous réforme. C’est mâle la misère. C’est exigeant. » « Alors moi, aujourd’hui, je vous crie salauds à vous deux. Toi, ma mère, garce, je ne sais où tu es passée. Si tu vis quelque part, sache que tu peux m’offrir une joie. Celle de ta mort. Garce ! Il fallait recouvrir à l’hygiène. Il fallait me tuer. Il fallait ne pas subir cette petite mort de mon enfance, garce ! Si tu n’es pas morte, je te retrouverai un jour et tu paieras cher, ma mère. «
« C’était plein de chuchotements, de petits cris du ventre, de sons mats, de souffles rapides. C’était l’amour des bêtes. L’amour primitif enveloppé de nuit, de pauvreté, de saleté. Son aspects brutal, possesseur, égoïste, largement mis en évidence par cet obscur besoin que nous avions tous de nous avilir, de nous déprécier »