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  • : Passion des livres
  • : Les coups de coeur de mes lectures. Venez découvrir des classiques, des romans français ou étrangers, du policier, du fantastique, de la bande dessinée et des mangas...et bien des choses encore !
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Internautes lecteurs, bonjour !

J'ai découvert l'univers des blogs très récemment. Je suis bibliothécaire et mon métier est donc de faire partager ma passion. Voici donc mes coups de coeurs et n'hésitez pas à me faire partager les vôtres !

Je vous parlerai surtout de littérature française et étrangère contemporaine sans oublier bien sûr mes classiques préférés...

Une rubrique est également réservée aux lectures pour adolescents ainsi qu'à la BD et aux mangas.

Bonne lecture !

 

 

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6 avril 2008 7 06 /04 /avril /2008 15:39

ETATS-UNIS











1930
Traduction française de 1933

Voici l'un des romans les plus connus de Faulkner, l'un des premiers traduits en France avec Sanctuaire.Pour les "non initiés" à la technique faulknérienne, ce roman est avec Sanctuaire l'un des plus accessibles bien qu'il utilise la narration éclatée, la succession de monologues de narrateurs différents (une vingtaine en tout).

Le titre est emprunté à une phrase de l'Odyssée d'Homère. Il s'agit en fin de compte d'une épopée tragi comique mêlant le drame et la farce.

L'action est centrée sur la famille Bundren : dans un village perdu du Mississippi, Addie Bundren, la mère, se meurt. Elle a fait promettre à son mari, Anse et à ses 5 enfants, Darl, Cash, Jewel, Dewey Dell et Vardaman de conduire son cercueil jusqu'à la ville de Jefferson, là où sont enterrés ses propres parents. Le roman commence par les coups de marteau incessants de Cash qui fabrique son cercueil devant sa mère agonisante.

A la mort d'Andie, la famille embarque sur une charrette branlante, pour Jefferson. Les péripéties se succèdent : les ponts cèdent face à la rivière déferlante, les mules meurent noyées....Cash se casse une jambe qui se gangrène...tandis que les busards rôdent autour de la charrette puante....

On s'attend à un lyrisme, à un pathos certain. Nullement ! Chaque personnage est obnubilé par quelque chose de très concret : le dentier de Anse, la fausse couche de Dewey Dell, le cheval de Jewel, les outils de Cash. Tout est tellement dramatique que tout devient grotesque. Les monologues sont écrits dans une langue très simple, bien qu'incantatoire. Le "choeur", les voisins, les médecins, les connaissances de la famille Bundren, désacralisent à tour de rôle l'entreprise funeste, en affirmant que c'est une folie.

Quant au coup de théâtre final, on n'est pas près de l'oublier....

Les récits s'entremêlent, se croisent. On apprend au fur et à mesure les secrets, les non-dits des personnages (les adultères. les avortements...)Adie, qui est morte, prend la parole au centre du roman.

Dans cette farce tragique géniale, Faulkner parodie la mort antique. Les monologues qui se succèdent sont à la fois une densité romanesque et une dimension théâtrale. Rien d'étonnant à ce que Jean Louis Barrault les ai immédiatement mis en scène en 1935 dans Autour d'une mère.

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31 mars 2008 1 31 /03 /mars /2008 12:22

ALLEMAGNE

La marquise d'O...

Editions Libretto

Von Kleist (1777-1811) est un écrivain romantique allemand contemporain de Goethe. Il n'a jamais obtenu un grand succès de son vivant et reste surtout connu par sa mort : il se donna la mort avec sa compagne en 1811.
Ses nouvelles ont été beaucoup jouées cette année au Théâtre dont La Marquise d'O au Théâtre de Saint-Denis.

Rappelons aussi que cette magnifique nouvelle a été adaptée au cinéma par Eric Rohmer en 1976. J'ai d'ailleurs hâte de voir le film où Rohmer s'est inspiré pour la mise en scène des tableaux de Greuze et d'Ingres.

La Marquise d'O...est un mélodrame romantique, merveilleusement désuet..Je suis sous le charme !

En 1799, une place forte italienne est conquise par les Russes. Une Marquise veuve est violentée par une bande de soldats ivrognes. Un colonel la sauve in extrémiste du viol. La Marquise s'évanouit et le colonel disparaît....pour revenir quelques mois après la demander mystérieusement en mariage ...

Cette dernière, sujette à d'étranges nausées, et s'étant jurée de rester veuve, refuse, bien que troublée. Quelques jours plus tard, elle découvre qu'elle est enceinte. Ses parents, la croyant dépravée, la renie. Persuadée d'être restée "pure" depuis son veuvage, la Marquise passe une annonce dans le journal : que le père de l'enfant qu'elle allait mettre au monde devait se faire connaître, et qu'elle était décidée, pour des considérations de famille, à l'épouser.

Rebondissements, dilemnes entre la passion et le devoir moral, innocence, tout est présent pour faire de ce mélodrame d'un autre âge un petit chef d'oeuvre. Sur une soixantaine de pages, Von kleist va à l'essentiel, décrit d'abord les actions, les rebondissements sans s'apesantir sur des tirades dramatiques. Et c'est là que réside la force du récit ; bien que l'intrigue soit complètement désuète (la veuve se croit l'élue du Saint-Esprit, elle veut se marier coûte que coûte), l'auteur décrit si vite l'action que les émois romantiques se sont qu'évoqués très pudiquement.

J'ai littéralement été emballée par ce récit invraisemblable et j'ai hâte de voir le film de Rohmer...

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30 mars 2008 7 30 /03 /mars /2008 15:06

ITALIE

Ay, Paloma

Editions Rivages, 2000

Après Un chocolat chez Hanselmann, voici un autre célèbre récit de Rosetta Loy. Toujours la même période, la même atmosphère de "paradis terrestre" alors que la guerre gronde. Mais ce récit est beaucoup plus classique, beaucoup plus lisse que le précédent.

La narration est linéaire et nous avons droit qu'à un seul point de vue, celui d'une gamine de 12 ans.

Nous sommes en août 1943 lors de la déroute de Mussolini. La bourgeoisie des villes se réfugie dans le Val d'Aoste dans de petits villages. Les enfants jouent, se chamaillent et les premiers émois amoureux ont lieu. Mais lors de la déroute italienne, les pro-mussoliniens s'affrontent avec les partisans. Cette période sombre sonne la fin de l'enfance, de l'insouciance pour les enfants. Les trahisons et les chagrins sont au rendez-vous.

On retrouve ce regard en même temps très candide et très juste d'Un chocolat...Mais les personnages ont beaucoup moins de profondeur et n'ont pas l'ambiguïté du chef d'oeuvre de Loy. Bien plus, ils sont profondément manichéens.

Le récit a le mérite d'aborder une période de l'histoire italienne très peu traitée en littérature et très peu connue.

C'est ce que je retiens de ce titre.

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30 mars 2008 7 30 /03 /mars /2008 13:30

Editions de Minuit,1995

Nous trois

Jean Echenoz n'est plus à présenter.C'est l'un des auteurs français les plus connus, les plus réputés. Cherokee,Le Méridien de Greenwich, Au piano, Ravel l'ont imposé comme un écrivain au style sans nul autre pareil, très ironique, détournant par exemple les récits d'aventure ou les romans policiers.

Je vous propose Nous trois, titre relativement peu connu, récit complètement déjanté, à mi chemin entre la science-fiction et un roman d'amour ! Le personnage principal est un anti-héros typique, Louis Meyer, ingénieur dans une firme aérospatiale. Il lui arrive des aventures plus que rocambolesques !

Divorcé, vivant seul, Il décide de partir en vacances à Marseille retrouver une ancienne conquête et sans-doute en chercher une autre...En pleine autoroute, il sauve une belle inconnue dont la voiture vient d'exploser ! Celle-ci étant presque mutique, il décide de l'appeler Mercedes du nom de sa voiture !!!Et voila qu'à Marseille, un tremblement gigantesque a lieu...Meyer patauge dans la gadoue et parvient à s'extirper de la ville sinistrée non sans mal...

C'est là que Blondel l'appelle pour servir de cobaye dans le lancement du satellite servant à détecter les tremblements de terre. Et voila que Meyer est soumis à un entraînement de chien pour partir dans l'espace....et peut-être rejoindre sa bien aimée !

Dans un style très personnel telle une épopée don-quichottesque moderne, Echenoz nous narre des aventures rocambolesques
incroyables mais cela prend sans problèmes !

Personnellement, j'ai vraiment beaucoup rigolé. Meyer est irrésistible de maladresse. Quelques passages comme Meyer qui sauve Mercedes lors de l'explosion de sa voiture ou les entraînements en vaisseau spatial sont irrésistibles.

L'écriture est très rythmée et la construction intéressante : les chapitres font alterner les aventures de Meyer
avec une voix inconnue, qui va rejoindre Meyer à la fin et qui donne tout son sens au titre...

Un titre presque inconnu mais qui vaut le détours !

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27 mars 2008 4 27 /03 /mars /2008 21:50
ITALIE



Editions Rivages, 1995

Rosetta Loy est reconnue comme étant l'un des meilleurs auteurs italiens contemporains. Son thème de prédilection est l'Italie pendant la Seconde Guerre Mondiale, période qu'elle a bien connue étant enfant.

Je connaissais cette auteur de réputation mais ne  l'avais pas encore lu. Ce titre, l'un des ses plus connus, est une merveille de subtilité. L'intrigue se déroule sur plusieurs années mélangeant les points de vue narratifs. Un secret de famille se dévoile petit à petit au fil des pages ; le flou artistique entretenu est un moteur de l'action.

Tout se passe dans un lieu au nom magique, dans les montagnes suisses à Chesa Silvascina : un chalet, un lac, des forêts, la neige. Madame Arnitz, la maîtresse de maison, tente en vain de maintenir son petit monde autour d'elle mais en vain ; sa fille aînée, Isabella est partie pour Rome épouser un professeur. Quant à Margot, la cadette, courtisée par Eddy, un ami de la famille, elle est séduite par Arturo, le juif clandestin venue se réfugier dans la propriété en Suisse sur les conseils d'Isabella, son amante. Bientôt, Margot s'enfuit avec Arturo et Eddy disparaît...

Que s'est-il vraiment passé ce jour là ? Quelle est la vraie relation entre Arturo et Isabella ?

Les événements sont d'abord vus par le regard de Lorenza, fille d'Isabella, gamine. Puis c'est au tour de Madame Arnitz de s'interroger sur la fuite de sa fille. Enfin, des années plus tard, Lorenza enquête auprès de Margot et cherche à comprendre sa mère. Puis, dans les dernières pages, la signification du titre nous est dévoilée.

De ce livre, on retient d'abors l'atmosphère feutrée. Dans un cadre idyllique, la Suisse, isolée des drames de la Seconde Guerre Mondiale, la guerre devient privée. Les drames inattendus se nouent mais cachés de tous.

Ensuite, il y a ces personnages, ces actions qui se dévoilent peu à peu : Arturo, le juif qui refuse son statut de victime, est un très beau personnage de roman, incarnant la culpabilité enfouie. Dans ce titre, les actions viennent d'abord, leurs explications ensuite.

La narration très subtile organise une danse des personnages qu occupent le premier plan à tour de rôle, à des époques différentes.

Une ode à la mémoire familiale et à ses secrets enfouis. Du grand art.


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24 mars 2008 1 24 /03 /mars /2008 14:17
Comme je n'ai pas encore lu les nouveautés qui sont parues lors du Salon du Livre, je vous envoie un florilège des articles que j'ai publiés sur des romans israéliens.
Aharon Appelfeld, Etgar Keret, Yehoshua Kenaz,Abraham B Yeshoshua,Zeruya Shalev sont d'immenses écrivains qui montrent bien que la littérature et la politique sont deux mondes séparés.

Rappelons notamment qu'Amoz Oz et Abraham B Yehoshua sont d'ardents défenseurs de la paix au Proche-Orient.

Voici donc


Le responsable des ressources humaines

Je suis maintenant tentée de découvrir l'oeuvre d'Orly Castel Bloom, une femme écrivain précurseur qui a introduit notamment la vie quotidienne et l'intime au coeur de la fiction israélienne. Son dernier livre paru : Textile

Textile
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24 mars 2008 1 24 /03 /mars /2008 14:05
Signalons une belle entreprise des bibliothécaires :

www.lechoixdesbibliothécaires.com

Les bibliothécaires vous convient à partager leurs coups de coeur.

Une originalité à signaler : des enregistrements MP3 livrant la voix d'éditeurs présentant des titres et la voix d'auteurs lisant leurs textes.

En plus, une revue de presse complète d'une liste impressionnante de titres.

Vous pouvez même envoyer vos commentaires sur un titre même si vous n'êtes pas bibliothécaires !

Surfez bien !
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22 mars 2008 6 22 /03 /mars /2008 22:33
ISLANDE

L'homme du lac

Editions Métaillié, 2007

Voici le quatrième roman paru en France du célèbre romancier policier islandais. Ce dernier s'est fait connaître avec La Cité des jarres et La femme en vert, des enquêtes du célèbre Erlendur sur des cadavres qui réapparaissent plusieurs décennies après leur mort ; petit à petit, l'intrigue fait alterner l'enquête et l'histoire telle qu'elle s'est déroulée dans le passé, qui a abouti à un meurtre.

L'homme du lac apporte cependant une nouveauté : alors que les précédents romans déterraient des histoires de l'ordre du l'intime, dans le cercle familial, Indridason nous plonge dans la grande Histoire, au temps de la guerre froide. Un cadavre est retrouvé dans un lac islandais qui se tarit. On le retrouve à côté d'émetteurs radio, des systèmes d'écoute d'origine russes. Et nous voila partis sur les traces de l'espionnage communiste au temps de la guerre froide.

Parallèlement, nous suivons, dans le passé, le destin d'un groupe d'étudiants islandais partis faire leurs études à Leipzig, en RDA dans les années 50. Le temps des premières révoltes contre le système stalinien ...et le temps des répressions de la police politique...

Au centre de ce groupe d'étudiants, un jeune idéaliste, Thomas qui tombe amoureux d'une jeune hongroise, Llona qui critique ouvertement les dérives du régime communiste...

Bien que l'intrigue ait du mal à démarrer, nous nous attachons progressivement aux personnages ;  en parlant de relations internationales, d'espionnage, Indridason parvient à introduire une dimension intime, un drame humain qui centre l'histoire sur un personnage.

Sans doute pas le meilleur d'Indridason mais tout de même une histoire d'amour touchante et quelques savoureux moments sur la culture islandaise !
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18 mars 2008 2 18 /03 /mars /2008 23:02
Actes Sud, 2005



Véronique Ovaldé, jeune auteur de 35 ans, vient de recevoir le Prix France Culture Télérama pour son dernier opus Et mon coeur transparent. Je me suis donc empressée d'emprunter son avant dernier titre, Déloger l'animal.

Et bien j'ai été déçue ! L'histoire est belle, touchante, mais je n'y  ai pas cru. Tout s'explique : j'ai vraiment eu du mal à croire en cette jeune adolescente attardée (on ne cite pas sa maladie mais on sait qu'elle va dans un institut spécialisé, qu'elle vit en solitaire avec ses lapins) qui s'exprime dans un style  très métaphorique, aux phrases très amples, pas du tout enfantin même si l'écriture va au plus proche des sensations ressenties.

Déloger l’animal










J'ai davantage eu l'impression d'être devant une gamine fantasque qui cherche à vaincre la disparition de sa mère par l'imaginaire.

A part ce gros défaut, il reste une histoire attachante. 

Rose est une jeune fille attardée qui vit dans une ville d'Afrique avec Maman Rose, qui vient d'un "pays enneigé" et de Monsieur Loyal, qui dirige un cirque. Un jour, Maman Rose disparaît...laissant sa fille avec Monsieur Loyal. Mais ce dernier est-il vraiment son père ? Dirige-il vraiment un cirque ?

Pour conjurer la solitude et le manque de courage du monde des adultes, la petite Rose va, à partir d'un article de journal, inventer un passé à Maman Rose qui expliquerait sa fuite...

Elle sera aidée par Madame Isis, une vieille voisine qui n'a plus toute sa tête...

Une histoire emplie de fantaisie et de poésie mais qui ne gagne rien avec son personnage d'adolescente attardée. Pourquoi pas une petite fille normale ?
Avec un langage moins métaphorique, on y aurait davantage cru !

Que donne Et mon coeur transparent ? J'ai hâte de voir vos réactions...
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16 mars 2008 7 16 /03 /mars /2008 16:01

Un poète à l'honneur : Philippe Longchamp



On dit souvent que la poésie contemporaine est hermétique, élitiste, froide...Philippe Longchamp est tout le contraire...Sa poésie est humaine, elle brosse le portrait de personnes souvent marginales avec beaucoup de tact et d'art...

Philippe Longchamp est aussi un voyageur des petits chemins capable de transformer la ville de La Roche-Sur-Yon en "Ville du jardin des latitude".

Enchanteur du quotidien, Philippe Longchamp écrit des petits carnets de voyage impressionnistes qui décèlent l'insolite ou un moment éphémère, une personne ou un lieu caché..

Je vous livre quelques poèmes de celui que j'ai eu l'occasion de rencontrer dans la Médiathèque où je travaille...

Des pas de crabe sur du jaune, Cheyne Editeur

Philippe Longchamp - Des pas de crabe sur du jaune

"
Elle est du temps des cerceaux en bois, des
crécelles et des poupées à tête de porcelaine
peinte, elle n'oublie jamais ça. Non plus
qu'elle s'est comme chacun abondamment
trompée, ramassée toute seule avec les
genoux couronnés et des meurtrissures à
l'intérieur de la tête.C'est que depuis aussi
longtemps qu'elle se souvienne, c'est à dire
huit ou neuf décennies, elle a toujours
voulu bouger, toujours cherché à voir
par-dessus les épaules, ou les palissades,
toujours écouté ce qui faisait mourir ou rire
ou jouir ou courir ou pleurer les quidams.
Et ainsi, maintenant, elle sait assez bien
entendre quand on lui parle. Dans le
temps, bien sûr, elle a froncé les sourcils.
Maintenant, plus jamais. Si quelqu'un lui
crache, si quelqu'un lui crie, si quelqu'un
lui pleure, elle peut entendre, elle sent
comme ça descend dans sa gorge, comme
c'est autre chose qu'un discours qui lui
est fait, que c'est une détresse jetée là qui
ferait bouchon en un rien de temps si elle
n'était pas si ouverte, ses portes du dedans
ouvertes.

Elle sait combien on peut se mentir puis
déchirer ou se déchirer quand on s'enferme
dans des mots trops bleus chaque fois qu'on
est au contact sur les parvis des églises,
les marchés couverts en fin de journée,
les salles d'attente des hôpitaux ou les
réfectoires des hospices. Et ainsi, main-
tenant, si on lui parle, elle sait à peu près
comment s'ouvrir pour laisser entrer les
mots, châtaignes pas toujours dégagées de
leur bogue.

Ce qu'elle aime, ensuite, c'est aller s'asseoir
à la hauteur des écluses, voir comment les
péniches chaque fois sombrent au-dessous
du double quai dans le bruit du bouillon-
nement, puis les vantaux d'aval s'écartent et
on voit glisser dans le silence ces dizaines
de tonnes comme feuille morte sur l'eau
redevenue immobile"

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