THAILANDE
Seuil, 2005
Voici le premier auteur thaïlandais que je lis. Sangsuk nous emmène dans la jungle, monde à la fois luxuriant et mafélique.
L'auteur met en scène, le révérend père Tiane, un vieux bonze qui raconte le soir au coin du feu des légendes de son pays ni tout à fait vraies ni tout à fait fausses. Lorsqu'il s'était rendu en pèlerinage en Inde et qu'il s'était trouvé nez à nez avec une horde d'éléphants ou lorsqu'il avait combattu un cobra...
Mais ce soir là, Tiane va brusquement changer de ton lorsqu'il décide de raconter aux enfants du village pourquoi il est devenu bonze: à la fin du siècle dernier, un tigre saming , mangeur d'hommes dont l'âme maléfique de la victime l'habite, a transformé la vie du jeune Tiane en véritable tragédie.
Sangsuk change brusquement de ton au quart du roman: au début, le lecteur a l'impression que l'auteur lui raconte toutes les légendes magiques de son pays. Puis brusquement, le récit se focalise sur la vie du bonze et sur son combat avec le tigre.
Ce livre est un hommage vibrant au monde de la jungle: Sangsuk nous décrit avec beaucoup d'érudition la flore et la faune de son pays. Chaque élément est minutieusement décrit dans des phrases amples proches de l'incantation. Il livre également une réflexion sur la place de l'homme au sein de la nature sans oublier de faire un constat sur l'évolution des milieux naturels en Thaïlande: disparition progressive de la jungle remplacée par des routes et des clubs touristiques. L'auteur décrit la lutte de l'homme contre son destin et contre la mort.
Ce récit n'est pas sans rappeler Le vieux qui lisait des romans d'amour de Luis Sepulveda, qui traitait lui aussi d'un affrontement majestueux entre un vieux gringo et un tigre. On peut aussi citer Le vieil homme et la mer d'Hemingway.
Sangsuk vénère apparemment le combat entre l'homme et l'animal : l'un de ses romans, Venin, met en scène un jeune gardien d'élevage amputé d'une main, qui lutte contre un cobra de l'autre main.
Un récit vraiment riche et dépaysant qui nous fait froid dans le dos.