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CONGO - LITTERATURE FRANCOPHONE
Le Serpent à plumes, 2003
Voici l'une des oeuvres phares de l'un des auteurs francophones les plus prometteurs, invité au Salon du Livre ce week-end.
Cette oeuvre est la parodie humoristique du sanglant American Psycho de l'américain Breat Easton Ellis ( un cadre dynamique qui se transforme en tueur en série la nuit) puisqu'il s'agit de l'itinéraire d'un criminel raté: Grégoire Nacobomayo est un orphelin vivant dans un bidonville. Carrossier de son état, il a décidé de suivre les traces du célèbre Angoualima, le célèbre serial killer qui depuis des années défie les pays, ses flics, ses juges et ses journalistes. Maintenant que ce héros est mort, Grégoire veut le remplacer. Il va méditer chaque jour sur sa tombe en lui demandant des conseils. Mais voila un sérieux problème: il n'arrive qu'à être un petit délinquant miteux: lorsqu'il veut violer les femmes, il n'a pas d'érection. Lorsqu'il veut tuer, il se fait devancer par plus fort que lui !
La force de ce roman réside dans son ironie ravageuse. Mais sous cet humour, se cache la triste vie de la population pauvre congolaise; Grégoire trouve un sens à sa vie dans la perversité.
On apprécie également un vocabulaire très typique et coloré: le coin natal de Grégoire s'appelle le quartier Celui-qui-boit-de-l’eau-est-un-idiot, ensemble harmonieux de taudis nauséabonds. Grégoire y écume les bars, au choix le Buvez, ceci est mon sang, le Boire fait bander ou le Verre cassé-Verre remboursé, en écoutant le groupe le plus populaire du coin, les Frères C’est-toujours-les-mêmes-qui-bouffent-dans-ce-pays-de-merde. Il rode dans la rue Cent-francs-seulement (le prix des prostitués !)
"En fait, la rue principale portait jadis le nom de Six-cents-francs-au-moins avant que les filles venues du pays d’en face l’envahissent et fassent chuter le prix de l’éjaculation payante en le ramenant, que Dieu m’en garde, à cent francs seulement au lieu de six cents francs au moins ! »
Les pages les plus belles et les plus tragi-comiques sont sans doute les chapitres ou Grégoire dialogue avec son héros d'outre-tombe dans le cimetière de Ceux qui n'ont pas droit au sommeil : Angoualima n'arrête pas de lui dire que c'est un nul qui n'arrivera jamais à rien alors que Grégoire va prier sur sa tombe tous les soirs....
Un roman vraiment original qui prouve que la littérature africaine évite tout misérabilisme en traitant de la pauvreté avec humour pour mieux l'exorciser.