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  • : Passion des livres
  • : Les coups de coeur de mes lectures. Venez découvrir des classiques, des romans français ou étrangers, du policier, du fantastique, de la bande dessinée et des mangas...et bien des choses encore !
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Internautes lecteurs, bonjour !

J'ai découvert l'univers des blogs très récemment. Je suis bibliothécaire et mon métier est donc de faire partager ma passion. Voici donc mes coups de coeurs et n'hésitez pas à me faire partager les vôtres !

Je vous parlerai surtout de littérature française et étrangère contemporaine sans oublier bien sûr mes classiques préférés...

Une rubrique est également réservée aux lectures pour adolescents ainsi qu'à la BD et aux mangas.

Bonne lecture !

 

 

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13 août 2010 5 13 /08 /août /2010 19:30

UN AVANT-GOUT DE LA RENTREE LITTERAIRE

 

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

 

Actes Sud, 2010

 

Voici en avant-première, avant sa sortie le 31 août, le nouvel opus de Mathias Enard, auteur il y a deux ans du remarqué Zone.

 

Il signe ici un roman historique sur les coulisses du monde de l'art et sur la vie méconnue de Michel-Ange. Nous sommes en 1506 ; le grand artiste n'a pas encore décoré la Chapelle Sixtine, il le fera quelques années plus tard. Alors qu'il est au service du pape Jules II et que ce dernier tarde à lui délivrer les finances pour la réalisation de son mausolée, le sculpteur est contacté par les ambassadeurs du Sultan de l'Empire Ottoman. Ce dernier souhaite qu'il construise un pont sur La Corne d'Or, reliant les deux rives du Bosphore.

Le grand sculpteur quitte alors Rome pour s'installer chez les infidèles à Istanbul...

 

Mathias Enard, grand spécialiste de la culture arabe et persane, s'inspire bien sûr d'un fait réel. Michel-Ange a bien réalisé des croquis de ce pont, après Léonard de Vinci.

 

A partir ce ce fait réel, l'auteur brode une histoire follement romanesque où le génie est courtisé par le grand poète ottoman Mesihi et par un être mystérieux, moitié homme, moitié femme, juif expulsé de la récente Espagne des Rois catholiques.

 

Le lecteur est plongé dans un conte oriental où les personnages gardent toute leur énigme.

Dans un clair-obscur magistral, Enard fait alterner la voix  du sculpteur et le mystérieux danseur-poète qui est tombé amoureux de lui.

 

On appréciera également, à l'image du pont de la Corne d'Or, un Michel-Ange entre deux eaux, qui hésite beaucoup : le jeune sculpteur hésite entre deux cultures, entre deux destinées, entre deux amours...

Voici un artiste en gestation qui sera à jamais marqué par ce qu'il a vu à Istanbul : l'auteur nous dit que son amour lui a inspiré le corps d'Adam de la Chapelle Sixtine...

 

Légende ? Sûrement. Ce court texte, telle une miniature persane, regorge de petits contes. Quant au titre énigmatique, c'est un hommage à la force des histoires, des contes lorsqu'on a tout perdu dans les ravages de la grande Histoire.

 

Une belle occasion aussi de découvrir la culture ottomane à travers le beau portrait du poète Mesihi

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15 juillet 2010 4 15 /07 /juillet /2010 12:41

Gallimard, 2006

 

 

Trois itinéraires japonais...

 

C'est la première fois que je lis un titre de Philippe Forest. j'ai entendu en avant-première un extrait de son nouveau roman paraissant en septembre, Le siècle des nuages, retraçant en même temps l'histoire de son père aviateur et l'histoire de l'aviation.

 

J'avais entendu parler de son écriture délicate, poétique et surtout du "cataclysme" fondateur de son écriture : la mort de sa fille de 4 ans d'un cancer des os.

Il a relaté ce drame dans L'enfant éternel, transformant sa fille décédée en être de papier.

L'enfant éternel

 

Dans Sarinagara, il s'agit encore une fois d'évoquer cette mort cruelle mais en la mettant en parallèle avec le destin de trois personnalités japonaises qui ont été confrontées soit à la mort d'un enfant, soit/et au face à face avec le néant : Issa, dernier grand poète spécialiste du haïku au début du XIXe siècle, Natsume Soseki, l'inventeur du roman japonais moderne et le photographe Yamahata qui, le premier, prit des photos des ruines de Nagasaki après l'explosion de la bombe nucléaire.

 

Roman ? Essai ? Biographies ? Sans doute les trois à la fois, le tout rassemblé en quête initiatique. Philippe Forest ne comprendra qu'à la fin ce qu'il est venu chercher au Japon.

 

Le titre du récit, qui signifie "cependant"est le dernier mot du plus célèbre haïku d'Issa :

 

Monde de rosé

C'est un monde de rosé

Et cependant (pourtant)

 

Il s'agit de comprendre "l'au delà" du néant, ce qui fait survivre après le cataclysme, la permanence d'un quelque chose qui résiste à la fuite du temps. C'est ce "cependant" que l'écrivain cherche à saisir.

 

Le texte, remarquablement écrit, loin de tout misérabilisme, est parfois ardu mais nous apprend plein de choses sur le destin de ces trois personnages. Je connaissais le grand romancier Soseki mais beaucoup moins Issa et n'avais jamais entendu parler du photographe de la bombe de Nagasaki.

 

Une belle occasion de découvrir la culture japonaise à travers ses arts et aussi de lire une écriture très fine.

 

une oeuvre très subtile qui mérite d'être relue plusieurs fois...

 

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21 juin 2010 1 21 /06 /juin /2010 20:04

PRIX EMMANUEL ROBLES ET JEAN GIONO, 2003

 

 

Editions Zulma, 2002

 

Voici le premier roman de Stéphane Héaume qui, depuis, s'est fait connaître comme une voix singulière, mêlant fantastique et onirisme.

 

Le clos Lothar est une fable fantastique en même temps qu'un conte politique : l'auteur nous plonge dans une dictature où les artistes sont chassés ou condamnés à mort. Ils n'ont plus le droit d'écrire, de danser, de dessiner...

 Le jeune écrivain Baptiste doit subir la censure. Ayant perdu sa raison de vivre, il s'apprête à se suicider. Il se rend dans une auberge "dissidente" où un vieil homme l'emmène dans un mystérieux passage. Il va bientôt découvrir une mystérieuse cave où s'entreposent des flacons d'encre de toutes les couleurs...

Ravissement total du héros...A l'instant même, les milices du Prince Sterpu pénètrent dans l'auberge. Baptiste reconnaît une connaissance d'antan, Lothar, un ancien danseur.

Ils vont s'enfuir tous les deux dans le repaire caché de Lothar...le Clos du même nom. Imaginez un vieux galion échoué sur une île, épave sauvée des eaux suite au réchauffement climatique. Les champs alentours, très fertiles donnent une vigne très spéciale : le vin est en fait de l'encre...

 

Un écrivain prêt à tout pour vivre de sa plume, un ex-danseur boiteux, une gitane mystérieuse et derrière tout ça, une vieille femme, peut-être morte, peut-être vivante.

 

Dans ce décor féerique, les passions et les destins vont se noués. On pense à Julien Gracq mais aussi à la Carmen de Mérimée. Amours incompris, destins brisés, lutte pour la liberté, mystère des personnages. Dans un style littéraire très musical, mêlant à la fois les longues phrases et les instantanées, Stéphane Heaume écrit une épopée politique célébrant la liberté de l'artiste.

 

Dans un rêve éveillé, les personn,ages partent vers une destinée, une destination inconnue...Et le lecteur se souvient longtemps de ces vignes d'encre, ces hordes de loups, ces chants de gitans et de ce galion surgit de nulle part.

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21 juin 2010 1 21 /06 /juin /2010 19:24

PRIX DU LIVRE INTER 2007

 

 

Editions Viviane Hamy, 2006

 

De cet écrivain français de premier plan, je n'avais lu que Groom, récit d'une grande fantaisie dans le monde de l'art.

Etant donné qu'il vient dans ma médiathèque au mois d'octobre et qu'il a présenté en avant-première son livre de la rentrée Les soeurs Brelan, j'ai eu envie de découvrir son oeuvre la plus connue, qui lui a valu le Prix du Livre Inter en 2007.

 

Quelle découverte ! Un magnifique roman sur la dialectique maître/esclave dans les terres giboyeuses d'un Ouest fantasmé, au milieu du XIXe siècle. Une propriété, des étangs, la brume, la forêt. Un baron fou, partagé entre sa passion pour l'esprit révolutionnaire et les jupons. Un garde-chasse, Lambert, soucieux de maintenir l'ordre dans la propriété, entouré de sa famille et de ses chiens. Au début, très dévoué, il découvre la folie de son maître, son obsession pour Victor Hugo qu'il rêve de rejoindre à Guernesey et surtout les jeunes femmes qui disparaissent...

 

Lorsque le Baron de l'Aubépine va s'en prendre à Magdeleine, la fille de Lambert, les rapports maîtres/valets vont se transformer... La chasse ne fait que commencer...

 

La folie, la chair, le sang mis en scène dans un décors forestier et brumeux. La tension est à son comble. Grâce à un style majestueux, haletant, suffoquant, Vallejo parvient à épouser la folie et la peur de ses personnages. Dans un flux verbal sans fin, refusant les mises à la ligne pour les dialogues, l'auteur épouse les différentes voix de ses personnages : phrases courtes, interrogations se fondent aux descriptions en tout genre. Le lecteur voyage dans la phrase, respire au rythme des personnages.

 

L'histoire est admirable et le style encore plus. Fait suffisamment rare pour le souligner. En même temps, Vallejo évite toute fioriture ; on sent le parler vrai, la voix du peuple, quasiment le patois, la respiration des personnages que ce soit Eugénie, la femme de Lambert où sa fille. On sent le flux intérieur des différentes pensées, sans jamais nous perdre.

 

Un magistral huis-clos qui nous plonge dans un XIX e siècle au bord de la folie, à milles lieux de la raison raisonnante des Lumières.

 

Un charme suranné, une belle oeuvre classique. Autrement dit, un chef d'oeuvre...

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20 juin 2010 7 20 /06 /juin /2010 23:18

EDITIONS DE L'OLIVIER, 2008

 

 

Une envie de littérature divertissante ? Une envie de sortir de la littérature bobo trentenaire maniaco-dépressive et prétentieuse ?

Une solution : une plongée dans l'oeuvre de Martin Page ...

 

Je ne connaissais que de nom cet auteur parisien né en 1975 qui s'est fait connaître en 2001 avec Comment je suis devenu stupide ?

Sa spécialité : le portait de héros fantasques, hommes très moyens au bord de la dérive qui nous font rire aux éclats par leur côté complètement décalé. Martin Page manie le sarcasme et l'humour noir avec brio, sans prétention.

 

Ce roman, par exemple, se lit comme une fable fantaisiste : Virgile est un trentenaire célibataire, collectionnant les aventures ; travaillant dans la publicité, il est très timide et ne veut surtout pas se faire remarquer. Surtout, pas d'ambition  ! Rester un homme moyen, invisible...alors qu'il vit dans un immeuble de passe !

 

Jusqu'au jour où, lorsqu'il rentre chez lui le soir, un message lui apprend que Clara le quitte. Sauf, qu'il ne connaît pas Clara !

Il croit alors qu'il est atteint d'une maladie dégénérative très avancée ....Il va voir sa psychanalyste qui lui prescrit des analyses. Pour lui, tout est fini. Il résilie même son bail et son électricité....

 

Mais en fait, il n'a rien. alors que tout le monde est au petit soin pour lui pour le soigner de sa "rupture", il s'aperçoit que cette fausse séparation va lui bouleverser sa vie...

 

Comment un homme plus que quelconque qui ne rêve que de se cacher parmi la foule va-t-il vivre cette aventure rocambolesque ?

Il va finalement découvrir que la fantaisie a ses avantages...

 

Le rire vient des aventures fantasques de ce Candide moderne en décalage profond avec son époque : il se retrouve avec une lampe torche au front pour faire face à sa coupure d'électricité, il doit subir les visites de son appartement puisqu'officiellement mort, il se retrouve à la CGT car il a refusé une augmentation qu'on veut lui imposer !!!!

 

On pense aussi un peu à Tati dans cet univers poétique décalé. C'est léger, divertissant, à l'opposé de cette littérature trentenaire dépressive. Un beau portrait d'un anti-héros d'aujourd'hui.

 

 

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27 mai 2010 4 27 /05 /mai /2010 22:44

Editions JC Lattès, 2002

 

 

Un beau récit d'enfance au temps de la guerre d'Algérie, lorsque les membres du FLN se mettent par la force des choses à côtoyer les pieds-noirs rapatriés à Paris...

 

Omar, 12 ans est un "porteur de cartable" : il assiste son père, membre du Front de Libération National, chargé de ramasser la collecte de l'adhésion au mouvement. Très souvent, Omar frappe aux portes du petit peuple pour rappeler qu'il va falloir payer...Le lendemain, son père empoche tant bien que mal (malgré les impayés !) le magot pour le porter au chef de section local, du 11e arrondissement. Et le grand révolutionnaire, le héros de Omar, promet à l'enfant qu'il sera son Premier Ministre en Algérie...

 

Un jour, alors que la famille d'Omar rêve d'emménager dans l'appartement plus grand d'à côté, le trois pièces est loué par des pieds-noirs rapatriés d'Algérie. Un enfant, Raphaël, une mère ayant perdu la raison après avoir quitté son pays et un père dépassé par les événements...

 

Omar éprouve au début une jalousie féroce envers Raphaël qui lui a volé l'appartement avec chambre et douche. Mais petit à petit, il découvre le désarroi d'un enfant qui doit vivre avec une mère malade.

 

Petit à petit, les deux familles ennemies se rapprochent...au dépend du porteur de cartable. Car le père d'Omar, accusé de "fréquenter" de trop près les ennemis est destitué de son poste de collecteur.

 

Une mère au bord de la folie...Un père qui perd son aura..Les deux enfants unissent leurs efforts pour sauver l'honneur.

 

Un beau récit qui exaltent les forces des rapports parents/enfants, sur un ton toujours humoristique et plein de tendresse. Ce roman a également le mérite d'évoquer une période peu traitée dans la littérature : la guerre l'Algérie et le retour des pieds noirs...Il y a aussi toute la magie de la vie du petit peuple algérien dans le Paris des années 50...

 

Intéressant, émouvant et drôle. Un beau récit d'enfance.

 

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15 mai 2010 6 15 /05 /mai /2010 22:45

2004  

 

HEAUME Stéphane - Orkhidos

 

Editions Zulma

 

On dit souvent que la littérature française contemporaine manque d'imagination. C'est sans conter Stéphane Héaume qui propose un mélange envoûtant d'aventures, de fantastique et de romantisme.

 

Orkhidos nous emmène dans un univers envoûtant digne des contes de fée ou mieux encore des jeux vidéos ! L'auteur est avant tout un créateur d'univers, de cités exotiques où le futurisme se mêle au passé. C'est un peintre qui décrit un monde dépaysant où paysages et personnages sont totalement originaux.

 

Roman d'apprentissage, roman d'amour, conte fantastique, conte de fée, rêve éveillé. Les portes d'entrée sont multiples.

 

Véra est une jeune femme fuyant un pays en guerre, qui débarque d'un bateau dans la ville d'Old York. Gratte-ciel en ruine, bidonvilles, montagne, port où se concentrent les bars, jardins botaniques, rues où l'on circule encore en fiacre. L'héroïne qui est sans papiers a peur de se faire arrêtée par les douanes. Mais sur le quai, une dame mystérieuse, Maud Truche, la prend sous son aile et l'embauche comme serveuse dans son club privé, l'Ostrich Club.  

C'est dans ce club qu'elle rencontre au bal un jeune homme mystérieux, un prince d'un royaume déchu, Alpey de Pondishandor...Nom et visage enchanteur ...Elle n'aura de cesse de le retrouver, de rejoindre son royaume.

Pour cela, il faut prendre l'Orkhid Express, train majestueusement baroque d'un milliardaire qui a pris Véra sous son aile. Traverser un étrange forêt d'orchidées pour aller dans une ville lacustre quasiment morte.

 

Le lecteur voyage dans un récit haletant, émerveillé par des univers oniriques, et toujours à l'affût du prochain événement. Cité lacustre, bar étrange, serre botanique aux perroquets et étranges personnages fantomatiques qui gardent toute leur ambiguïté. Une vieille dame (mère maquerelle ou bienfaitrice ?), un milliardaire au bord de la folie, un nain fantasque, deux jumeaux, deux face d'un même homme ?

Que ce soit les paysages ou les personnages, chaque élément a une face lumineuse et obscure, à l'image des orchidées. Maude et le nain Lypius sont-ils les amis ou les ennemis de Véra ? Qui est vraiment Véra, d'où vient-elle ?

Le prince de Pondishandor, silhouette fantomatique,  n'est-il pas qu'un rêve éveillé ?

Peu à peu les secrets se dévoilent et la "princesse" est le jeu de forces bien obscures.

Le lecteur a l'impression de voir des marionnettes ou encore des personnages d'un jeudi vidéo, manipulés dans un univers virtuel.

Stéphane Héaume, à travers  une belle prose poétique, renouvelle avec brio le genre du conte.

 

 

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6 mai 2010 4 06 /05 /mai /2010 22:08

Editions Actes Sud, 2010

 

 

Je continue de découvrir l'oeuvre très originale de Denis Lachaud. Dans son dernier opus, contrairement aux autres romans, il fait parler des adultes et non plus des adolescents. Des adultes meurtris mais l'histoire est racontée de telle manière que nous avons l'impression d'être dans un conte.

 

Deux êtres un peu perdus, à l'aube de la quarantaine. Des ruptures, la solitude. L'un se réfugie dans le théâtre et l'écriture, l'autre dans un blog. L'un est anglais, l'autre français. leur destin vont se croiser : ils seront les deux seuls survivants d'un crash d'avion en pleine jungle.

Secourus et rapatriés dans leurs deux pays respectifs, l'un (l'une) n'aura qu'un seul désir : retrouver son alter ego, son Cary Grant, son homme silencieux...

 

Une belle histoire d'amour racontée sous forme de conte où rôdent constamment la mort et la solitude. Une atmosphère très particulière, une communication qui se passe des mots. Car tout est dans le ressenti, dans le silence d'avant les mots. D'autant plus que les deux personnages ne partagent pas la même langue...

 

Emmanuel et Lindsay ne se sont pas parlés ; Ils se sont juste secourus, touchés, regardés. Lindsay se souvient d'une carrure, d'une silhouette. Quand ils se retrouveront, ils se frôleront avant de se parler et de connaître.

 

Une belle parabole sur la toute puissance du silence et de l'écriture. Car si les mots ont du mal à venir, surtout dans le dialogue et la rencontre avec l'autre, ils existent à l'intérieur de l'être. Lindsay les profère par l'intermédiaire du théâtre, Emmanuel par son blog poétique.

Mais il s'agit de se diriger, de s'ouvrir progressivement à l'autre sans le blesser ou le trahir. Se révéler par les mots pour aimer, tout en gardant son individualité.

 

Des personnages très attachants, qui gardent tout leur mystère. Comme d'habitude, Lachaud joue sur l'ambiguïté des sexes ; tous les noms peuvent être masculins ou féminins, qui nous dit que Lindsay est une femme ? Les personnages sont avant tout des silhouettes fantomatiques qui dévoilent peu à peu  leurs secrets, leurs passés.

 

A nous d'interpréter, de faire notre proche chemin... Car avant de se parler entre eux, les protagonistes se parlent à eux-mêmes, par des écrits et donc indirectement au lecteur.

 

 

 

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28 avril 2010 3 28 /04 /avril /2010 19:36

Editions Verdier, 20010

 

La grande sauvagerie

 

Sélection Prix duLivre Inter 2010

 

De Christophe Pradeau, je vous avais déjà chroniqué son premier roman La souterraine; avec ce deuxième opus, Christophe Pradeau confirme son talent.

Son écriture précieuse, ses phrases proustiennes replace la littérature française d'aujourd'hui dans un écrin d'or. Langue surannée, longues phrases qui s'étendent sur des paragraphes entiers ; on citera bien sûr l'influence de Pierre Michon publié chez le même éditeur ; le même talent pour mythifier des lieux communs, des lieux de nos campagnes profondes, les lieux des vies minuscules.

 

Une vieille femme, une région, un lieu, des souvenirs d'enfance qui nous poursuivent toute une vie : voici le terreau de ce court roman de 150 pages.

 

Un personnage, Thérèse Gandalonie, jugez la poésie d'antan du nom. Un lieu , Saint-Léonard, une bourgade perdue du Limousin, près de la vallée de l'Auvezère. Au dessus de ce village, un roc surplombant la vallée, une lanterne des morts. "Concrétion géologique", elle servit autrefois de phare aux voyageurs.

Pendant toute son enfance, la petite fille a été comme happée, hypnotisée par cette lanterne, sans connaître sa signification ; elle savait que ce territoire était celui de "La grande sauvagerie", le royaume des broussailles, des forêts, des no mans land inhabités. Mais un jour elle y découvre une propriété abandonnée...

 

Des années plus tard, après avoir traversé l'Océan Atlantique, dans une bibliothèque américaine, elle découvre un vieux livre qui attire son attention ; le journal d'un peintre-voyageur, Jean-François, cousin de Rameau, qui a quitté Saint-Léonard, pour les grands espaces américains, le "wild", la "grande sauvagerie".

A partir de ce livre, elle va reconstituer l'histoire de la propriété de la Grande Sauvagerie.

 

Pradeau réalise une véritable mythologie des lieux. L'architecture semble parfois émaner directement de la terre, de la géologie (la lanterne est comparée à un stalagmite, une concrétion géologique). Mais la plupart du temps, le paysage est le fruit d'une opération mentale, celle de l'imagination et de l'archéologie de la mémoire ; il s'agit de fouiller au plus profond des strates de la mémoire, celle des individus, pour reconstituer l'histoire des lieux, ses contes et légendes. Car nous avons l'impression, tout comme la vieille narratrice, d'être assis au coin du feu et d'écouter les vieilles légendes qui ressurgissent.

 

Pradeau est un écrivain de la mémoire des lieux et des hommes mais aussi de l'espace. Bien que ses histoires s'enracinent dans un terroir précis, l'horizon s'ouvre vers de vastes inconnus ; il s'agit de trouver son propre chemin...qui nous fera peut-être revenir aux origines.

 

L'auteur voyage dans la sphère de l'espace-temps ; de même, le phrasé sinue, s'égare, randonne, voyage sur de longs chemins avant de mettre à jour le secret si bien gardé, la mémoire caché des lieux.

 

Du grand art.

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20 avril 2010 2 20 /04 /avril /2010 10:36

EDITIONS ACTES SUD, 2005

 

Denis Lachaud, né en 1964, est à la fois écrivain et metteur en scène (Compagnie théatralala). Depuis son premier roman, J'apprends l'allemand, publié en 1998, il conçoit une oeuvre romanesque exigeante sur les thèmes de l'enfance, de la quête de l'identité et de l'histoire familiale.

 

Le vrai est au coffre, roman à l'écriture limpide mais à la construction déstabilisante est un tour de force littéraire.

 

Comme à son habitude, Denis Lachaud fait parler de jeunes enfants et des adolescents. Ici, un enfant parle ; Tom a cinq ans, il vient de quitter Paris pour la banlieue, une cité très exactement, entre deux voies ferrées. Au début déstabilisé, Tom va y prendre goût ; le chemin de fer est un prétexte de déambulation qui nourrit ses rêveries. De plus, il se lie d'amitié avec Véronique, sa petite voisine. Ensemble, ils jouent à la poupée et vont même jusqu'à élever "leurs filles".

 

Mais, au moment de rentrer à la grande école, rien n'est plus pareil. Les grands le traitent de "tapette". C'est lors d'un séjour au ski que le destin de Tom va basculer...

 

L'identité sexuelle, la mort et la force de l'imaginaire sont des thèmes récurrents. Où s'arrête le réel ? Quand naît l'imaginaire ?

Denis Lachaud nous convie à un jeu de piste extraordinaire, tout en simplicité, tout en subtilité. Le lecteur vit de l'intérieur les émois, les interrogations de l'enfant, puis de l'adolescent. Tout est vu par son intermédiaire, par son regard si particulier, si subjectif.

 

Une vraie découverte littéraire à faire lire aux adolescents.

 

 

 

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